vivre sans majuscule

(Chronique d’un creux de vague)

Peiner,
souffrir,
ne pas avoir envie,
avoir mal,
désespérer,
être indifférent à tout,
me sentir nul, pas à la hauteur, inapte,
avoir envie de ne pas être…
rien de tout cela ne me dispense de vivre.

Peut-être même que,
dans ces situations,
dans ces ambiances intérieures,
vivre
– m’efforcer de vivre –
est-il ma seule option… raisonnable.

Mais qu’est-ce que “vivre”?

Tout d’abord: je mets volontairement un v minuscule.
Car le vivre dont il s’agit ici n’est pas fait de plénitude exaltante, de grands sentiments
qui nous chatouillent les majuscules.
Non.
Il s’agit de vivre, “à raz-les-pâquerettes”,
une vie quotidienne et banale, sans grandeur, sans noblesse,
sans générosité même.
Juste vivre, c’est tout.

“C’est tout”, ça veut dire “rien de plus”.
Mais ça veut dire également que “tout est là”.

Juste vivre, tout est là.

M’engager dans la vie,
comme je m’engage sur un sentier de montagne,
un pas à la fois,
sans précipitation,
mais aussi comme je m’engage dans un projet,
en m’exposant,
en payant de ma personne,
en donnant le meilleur,
dans la juste mesure de mes ressources.

Et lorsque
– cela arrive –
l’engagement n’est pas possible,
conserver du moins l’orientation,
l’orientation vers la vie.
Toujours garder présent à l’esprit
qu’une panne de boussole
n’a jamais tué le nord.

Il suffit parfois de faire ce que j’ai à faire,
simplement le faire,
sans plaisir, mais le faire,
sans motivation, mais le faire,
banalement le faire,
choisir de le faire et non le subir.
Et si parfois, le “faire” en question est,
justement,
de ne rien faire,
que ce soit par choix et non par abandon, ou lâcheté;
parce que le choix est ce qui me maintient vivant et libre.

− • • • −

“M’efforcer de vivre” écrivais-je;
car il me faut parfois mobiliser mes forces pour un geste simple,
mettre de la force et de la volonté,
pour remplacer,
fut-ce momentanément,
la motivation.
Et surtout, ne pas culpabiliser
lorsque je vois un autre faire le même geste,
apparemment sans effort, facilement.

Le meilleur rythme est,
toujours,
le mien.

Vivre.

Et découvrir que, parfois,
le fait d’être parvenu à vivre,
juste vivre,
me procure une satisfaction étonnamment goûtue;
et même,
de façon inattendue,
qu’une certaine plénitude peut se cacher
sous une peau de… banal!

D'où vient la lumière?Du couchant? De l'intérieur?
D’où vient la lumière?
Du couchant? De l’intérieur?

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