Henriette

J’ai fait des années de thérapie; J’ai lu des livres, écrits par des auteurs spirituels, des psys; J’ai lu des articles, assisté à des conférences; j’ai fait des retraites, des stages…

Une vérité m’a été enseignée, partagée, expliquée; une vérité profonde, en laquelle je crois de plus en plus fermement au fur et à mesure que je deviens capable de l’incarner au quotidien: une des ressources les plus utiles que l’on puisse acquérir et développer dans la vie, c’est la capacité à accepter la réalité telle qu’elle se présente.

(Cette véritable acceptation n’a rien à voir avec la résignation, le fatalisme, ni même l’approbation. Mais ceci est un autre débat.)

Cette acceptation de la réalité, de l’environnement, et plus particulièrement de l’autre, je l’ai apprise d’une façon plus précise dans les écrits de Carl Rogers. Ce psychologue américain a fait de l’acceptation une des trois clés principales de la relation d’aide; mais aussi une des attitudes de base qui permettent à la personne de se développer de façon saine et satisfaisante.

J’ai connu une femme. Elle n’a pas lu Rogers. Ni Gandhi. Elle n’a pas fait de séminaires de développement personnel. Mais elle a été à mes yeux une incarnation particulièrement juste et apaisée de cette vérité. Elle prenait la vie comme elle vient, les gens comme ils sont, en profitant avec reconnaissances de tout ce qui est bon, beau, utile, agréable ou simplement satisfaisant. Sa faculté de dire oui à ce qui est m’impressionnait, et, aujourd’hui encore, me nourri.

Qu’on ne s’y méprenne pas: Elle savait dire non aussi. Elle savait s’opposer, se révolter, prendre les moyens de changer ce qui pouvait l’être, quand la situation ne lui convenait pas. Mais elle avait cette sagesse de partir de la réalité telle qu’elle est.

Certains vont au bout du monde pour apprendre cela. Auprès d’un gourou indien, d’un sage africain, d’un maître ou d’une maîtresse, reconnu(e) ou autoproclamé(e), dans l’espoir de parvenir à grappiller quelques miettes de cette grande sagesse et devenir, tant que faire se peut, un peu plus “acceptant”.

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Il y a environ un an, je suis allé à Châtel-Saint-Denis, trouver ma belle mère.
C’est elle, la femme en question.
Je l’aimais beaucoup. Déjà, elle avait eu le bon goût de mettre au monde celle avec qui j’allais partager ma vie. Et, de plus, c’était un amour de belle-mère.

Je suis donc allé trouver Henriette, qui était alors dans une phase de pratique intensive de cet exercice d’acceptation de la réalité. Et sa réalité, à ce moment, c’était de sentir la fin de sa vie approcher à grand pas. Elle était là, dans l’attente du moment où le lien ténu qui la reliait encore à ce monde voudrait bien se défaire et la laisser passer à autre chose.

Assis à son chevet, je repensais au Darshan hindou. Et j’avais un peu l’impression de me trouver dans cette situation. Certes Henriette n’était pas un gourou, mais je crois qu’il n’y a pas besoin d’avoir à faire à un grand maître pour ressentir cela: Qui de nous ne s’est-il jamais senti “meilleur” de par le simple fait de fréquenter une personne perçue comme “bonne”?

En me tenant proche de cette femme pour laquelle j’avais une grande estime (rien à voir avec la vénération!), je me sentais un peu comme en état de réceptivité; comme si je pouvais recevoir, par sa simple présence, un peu de sa sagesse. Non la sagesse d’un gourou, d’un maître spirituel, mais la sagesse tout simple d’une femme ordinaire, issue d’un milieu modeste, sans prétention aucune; et bien sûr une femme imparfaite, qui avait comme toute personne humaine son lot de limites, de défauts, de maladresses; mais une femme qui resterait pour moi un exemple particulièrement pertinent de ce qu’accepter veut dire.

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Henriette, je voudrais pourvoir encore te serrer dans mes bras, sur mon cœur. Je garde de toi cette image, paisible, sur laquelle tu sembles avoir deux ailes rouges. Ces ailes sont en fait les bords d’un coussin en forme de cœur. Et ça me plait bien.

Et si, à cause de cette image, je pense à toi comme à un ange gardien, je ne puis m’empêcher de me dire également que tu représentes un peu, pour moi, la Mère. Et, par là, tu me relies à la mienne.

Henriette, tu sais quoi?
Je t’aime.

3 réflexions sur “Henriette”

  1. Merci pour avoir partager ces mots… ces mots qui sont bien plus que des mots, … ce sont des images, des sentiments, des odeurs, de la chaleur, qui m’emplissent le coeur, … et qui me rappellent la douleur de l’avoir perdue, mais le bonheur de l’avoir connue…Je t’aime aussi grand-maman… Merci encore Dominique….

  2. Je ne m’attendais pas, Dominique, à voir une photo à la suite de ton texte.
    Et, à découvrir Henriette, tout ce que tu en dis est une évidence: elle est là, simplement, sereine et qui nous regarde avec amour.
    Elle est belle ton Henriette et je suis heureuse d’avoir eu son darshan.
    Merci Dominique.

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