Lada Obradovic Project

J’ai rencontré Lada il y a quelques années. Elle allait devenir la femme d’un ami musicien, David Tixier, qui fait partie des personnes qui m’ont communiqué le virus du jazz contemporain.

C’est à l’occasion d’un concert de David, à Lausanne, que je l’ai vue pour la première fois. Elle commençait à peine à parler le français, et les quelques mots que nous avons échangés étaient en anglais, langue qu’elle maîtrisait mieux que moi. Cela me faisait plaisir de connaître la copine de David et j’étais loin d’imaginer les beaux moments que cette femme allait me faire passer.

Euh… je parle de musique, hein, pas de malentendu! Car la dame est batteuse, percussionniste et compositrice. Et moi, déjà, une femme à la batterie, ça me branche. Parce que j’aime bien voir des femmes là où l’on a plutôt l’habitude de voir des hommes.

J’avais très envie de l’entendre et j’espérais très fort aimer son jeu. Parce que je suis comme ça: elle était la compagne de quelqu’un que j’apprécie, j’avais donc très envie de l’apprécier, elle.

Je n’ai pas été déçu. Son jeu est d’une précision et d’une sensibilité qui me ravissent. Et de plus, j’adore la voir jouer. Pas seulement parce que je la trouve belle, mais parce qu’il y a quelque chose dans son attitude de centré, présent et… silencieux. Oui, je sais, ce mot m’a surpris aussi.

Cela fait maintenant plusieurs années que je suis la carrière de Lada et David, qui collaborent dans le cadre de plusieurs projets:

– Avec David, elle forme le Obradovic-Tixier Duo, qui explore les univers très vastes que leur ouvrent tant leurs instruments (claviers, batterie, percussions diverses) que différents dispositifs électroniques dont ils font un usage très à mon goût.

– Elle est la batteuse du David Tixier Trio, la classique formation piano-contrebasse-batterie.

– Et enfin, elle a son propre projet, le Lada Obradovic Project… dont le piano est tenu par David. Cette semaine, l’ensemble était deux jours en résidence à la fondation ABPI, à Lausanne. Je suis allé l’écouter jeudi soir.

Les compositions de Lada sont… courageuses. J’entends par là que, comme souvent dans le jazz actuel, la zone de confort ne fait pas partie du programme.

Encore que… si j’aime cette musique, c’est probablement parce que ça n’est pas QUE de l’audace, du vertige et de la complication. Il y a tout de même bien des moments où la compréhension de la mesure m’est accessible, où les harmonies, si elles me surprennent, ne vont pas jusqu’à m’écorcher les oreilles.

Hier soir, à Lausanne, malgré une acoustique un peu difficile, j’ai pleinement savouré le menu. Ce nouveau line up est cohérent, la complicité est là, et, pour leur premier live, je trouve qu’ils ont assuré. Oui, parce que Lada a récemment décidé de modifier la composition de son quintette. David est resté, mais le contrebassiste, le saxophoniste et le vibraphoniste d’origine ont été remplacés.

J’ai particulièrement goûté de nombreux moments d’écoute réciproque, où les uns et les autres se répondaient de manière parfois très subtile. Je me souviens plus spécifiquement d’un échange passionnant entre le vibraphone et le piano. C’est notamment dans ces moments-là que je perçois à quel point cette musique est vivante, à déguster prioritairement en concert. Parce que chaque interprétation est une oeuvre unique, qui n’existera plus jamais.

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Il y a plusieurs moyens de se faire une idée de cet univers musical:

– sur son site, en cliquant sur LADA OBRADOVIC PROJECT RECORDING SESSION 2016, on peut écouter trois des quatre titres qui figurent sur le CD démo (EP 2017) du projet:

– On peut aussi les écouter sur SoundCloud

– …ainsi que sur Bandcamp, la plateforme qui rémunère le mieux les artistes.

À noter cependant que ces enregistrements ont été réalisés avec les musiciens précédents. Avec les trois nouveaux, un CD est en cours de production, qui doit sortir en octobre; il contiendra l’intégralité du projet, soit neuf titres.

On trouve sur son site un document qui présente l’ensemble du projet ainsi que les réflexions et expériences qui ont suscité l’écriture de chacune de ces compositions. Un texte saisissant, plein d’humanité. J’avoue que, possédant le CD 4 titres et l’ayant écouté plusieurs fois avant de découvrir ces textes, j’ai été surpris de voir que ce que je ressens en écoutant cette musique est souvent bien éloigné de ce qui habite la compositrice. Mais qu’importe! Je suis de toute façon intéressé par la découverte de cet “envers du décor”.

– Des noms! Des noms!
– Bon d’accord:

Maxime Berton (FR) – tenor/soprano saxophone
Matthias Legner (AT) – vibraphone/marimba
David Tixier (FR) – piano/rhodes
Miha Koren (SLO) – contrebasse/basse électrique
Lada Obradovic (CRO) – composition/batterie

Et puis tiens: sans supplément de prix, je te livre encore une petite perle. Il s’agit de la vidéo d’une composition de Lada pour le duo qu’elle forme avec David. Le texte est emprunté à Edgar Allan Poe.

La pièce se structure progressivement, par couches successives. En concert, l’usage de “looper” permet cette empilement.  Le montage de cette vidéo, signé David Tixier, propose une visualisation de cette stratification.

Regarde, écoute: c’est de la bonne!

2 réflexions sur “Lada Obradovic Project”

  1. Très intéressant.
    J’aime beaucoup, mais entre les parties vocales. J’imagine qu’elle joue de sa voix, mais j’apprécie pas trop.
    Mais instrumentalement et en matière de composition, c’est vraiment top.
    J’irai voir les autres films quand je ne serai plus sur partage de connexion😀

  2. Merci!
    Perso, ne comprenant pas suffisamment l’anglais pour suivre le texte, je prends cette voix comme un instrument supplémentaire, que j’aime bien. Mais faudrait quand même que je trouve le texte et une bonne traduction, par curiosité.
    Content que tu apprécies la composition!

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