Marcher sans attente

Bizarre.

La dernière fois que je suis venu marcher ici, la température était à peu près la même, les conditions semblables à celles d’aujourd’hui, pourtant…

La dernière fois, j’avais ressenti du plaisir, le plaisir simple de la marche.

La dernière fois, je m’étais dit que vraiment, il faudrait que je marche plus souvent. 

C’est trop bon!

La dernière fois pourtant, j’avais dû un peu me pousser pour me mettre en route. J’avais dû me motiver. L’envie n’était pas là. 

Simplement, je m’étais dit que je ne marchais plus assez souvent, que tôt ou tard mon dos me le rappellerait; alors je m’étais mis en marche, un peu par devoir, sans beaucoup de conviction, sans autre motivation que celle de la nécessité de sortir de ma sédentarité de retraité pantouflard. 

Et puis, après quelques pas, le plaisir simple de la marche était venu.

Comme une évidence.

Mais aujourd’hui…

Aujourd’hui, je marche, mais le plaisir n’est pas au rendez-vous. 

J’ai beau écouter le chant printanier des oiseaux, humer les odeurs de la nature qui se réveille, le plaisir ne vient pas.

Je constate le chant des oiseaux, je constate l’éveil de la nature, mais ce constat reste insipide, sans émotion, sans vibration.

Aujourd’hui, je marche sans plaisir. 

Mais alors… qu’est-ce que je fais faux?

~ ~ ~

Ce que je fais faux? Peut-être est-ce, justement, de me poser cette question.

Ce que je fais faux? C’est peut-être de m’attendre à ressentir le même plaisir que la dernière fois.

Ce que je fais faux? C’est probablement de vouloir “rentabiliser” l’effort en me payant de plaisir.

Ce que je fais faux? 

Et si ça n’était pas ce que je fais qui est en cause, mais plutôt ce que je suis?

Ou plutôt la manière dont je suis; mon attitude, mon positionnement, mes attentes, ma relation à la marche, ma relation à moi-même. 

Finalement, attendre des mêmes causes les mêmes effets est assez infantile. 

De plus, si j’avais, la dernière fois, marché sans plaisir et que j’en ressentais aujourd’hui, serais-je en train de me plaindre?

Serais-je en train de me dire « qu’est-ce que je fais faux? »

~ ~ ~

Marcher.

Être présent aux sensations de mon corps en mouvement,
de mes jambes qui me portent,
de mes bras qui se balancent,
de mes yeux qui me permettent de m’orienter,
de mes poumons qui nourrissent mon sang,
de mon cœur qui, inlassablement, dans l’ombre, fait son job…

Être reconnaissant pour tout cela. 

Accueillir cette chance. 

Sentir le travail des muscles,
le soutien du squelette,
percevoir les précieuses informations de mon système nerveux.

Être là,
juste là,
ouvert,
accueillant la réalité
sans représentation de ce qu’elle “devrait être”,
sans attente de plaisir
sans attente de saveur particulière,
sans attentes.

Goûter pleinement ce qui est.

Marcher… 

…et apprendre à vivre comme je marche. 

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6 réflexions sur “Marcher sans attente”

  1. Connais-tu la méditation en pleine conscience ? Tu viens d’en exprimer certains ressentis. Être dans l’ici et dans le maintenant, tout simplement. Cela s’apprend, cela se cultive et s’entretient. Cela se voit par imagerie cérébrale.

    1. Oui, j’en ai entendu parler et j’ai lu des trucs. Ça fait pas mal de temps que je me demande si je ne veux pas m’y mettre.
      J’ai pratiqué d’autre formes de méditation par le passé.
      Et effectivement, cette vision de la marche que je décris est effectivement nourrie de cette « philosophie ».

  2. Si tu t’y mets, sache que tu dois tenir le coup, y aller avec conviction et jusqu’au bout. C’est pas “juste pour voir”.
    Une adresse ? Des articles ? je peux te passer un certain choix d’articles de revues scientifiques, notamment. Ça m’a beaucoup intéressé, la démonstration, et la compréhension d’une pratique si ancienne, et les moyens de mettre en évidence ses effets sur notre cerveau avec nos techniques modernes (IRM, EEG, et autres).

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